[Nylon Ganbare] Numéro 16

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Nylon Ganbare

La J.League bat son plein, les enjeux sont déjà nombreux et variés pour tous les clubs japonais, et c’est pourquoi Nylon Ganbare, la rubrique vendue avec le short, va parler cette semaine de la sélection nationale du Japon. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi beaucoup de gens suivaient cette équipe ? Pour beaucoup de monde, c’est parce que ce pays respire l’humilité et s’oppose aux traits négatifs du vieux continent. Pour d’autres, c’est parce qu’il fourmille de talents trop peu médiatisés. Pour d’autres encore, c’est parce qu’ils ont lu Capt… c’est parce que le Japon leur a tapé dans l’oeil lors de la coupe du monde 98, à la fois par la chevelure brûlante d’Hidetoshi Nakata et par son maillot à flammes.

Et  c’est vrai que ce maillot est devenu tout un symbole ! Déjà parce qu’il est le premier à avoir été porté par le Japon en coupe du monde. Ensuite parce qu’il représentait assez  bien le fighting spirit qui caractérisait l’équipe (faute d’un niveau meilleur à l’époque). Enfin, parce que son design même le démarquait assez facilement du reste. Et pourtant ce n’était pas facile, car la coupe du monde 98 fut remarquable en termes de variété de design et de personnalisation pour chaque équipe (on pourra en parler une prochaine fois).

Mais il faut savoir que cette démarcation, c’est une des caractéristiques qui a longtemps été propre au Japon. Avant même 1998. Une tradition d’uniques tuniques, en somme.

1993, l’instigation d’une volonté d’être unique.

Et pendant ce temps-là…

Le début d’un contrat quadripartite en 1993 entre la fédération, Adidas (équipementier de l’équipe jusque là), Asics et Puma, avait déjà en soi quelque chose de surprenant. Il fut l’occasion d’inaugurer un motif fort, et jamais vu ailleurs. Si le bleu restait majoritaire sur le maillot, celui-ci était quand même orné de nombreuses diagonales blanches qui diminuaient en largeur à mesure qu’elles s’élançaient vers l’épaule. Ces lignes étaient chevauchées de fresques de triangles rouges, qui permettaient de faire apparaître l’ensemble des couleurs japonaises sur le maillot.

Rien de transcendant avant 1993…

Tout le monde à la même enseigne.

Avec un rappel sur la manche droite et le short, ainsi qu’avec une reprise à l’identique, en inversant les couleurs, sur le maillot extérieur, ce motif était omniprésent jusque sur les survêtements et autres accessoires. Il marquait ainsi les esprits, surtout que l’équipe commençait à émerger grâce à des vedettes comme Ihara ou Miura, et grâce à la création du championnat national professionnel. Un joli contraste avec le maillot de 1992, simple modèle Adidas de l’époque, utilisé par beaucoup d’équipes, avec ces trois grosses bandes sur l’épaule. D’ailleurs, dans le même temps, les autres pays équipés par Adidas garderont ces grosses bandes, sur les deux épaules cette fois. Le drôle de contrat qui lie le Japon à plusieurs marques obligent celles-ci à rester neutres et à élaborer un design que toutes peuvent commercialiser sans problème d’éléments copyrightés (comme les trois bandes Adidas, justement). C’est plutôt bien puisque cela favorise la création de designs « libres » de toute emprunte faisant la part belle aux marques.

Comment allumer la flamme ?

Par la suite, en 1995, cette volonté de se distinguer continuera avec l’apparition des flammes sur les manches du maillot. D’une certaine manière, l’uniforme utilisé entre 95 et 97 était un prototype de celui qui allait apparaître pour la coupe du monde. Les flammes faisaient tout le tour des manches, le reste du maillot affichait déjà ce motif en surbrillance composé aussi de flammes, certains détails comme le nom de l’équipe dans le bas du dos ou les liserés blancs étaient absents, le short était tout blanc si l’on excepte un rappel des flammes sur les côtés. Le drapeau du Japon, déjà présent depuis 1993 sur la manche, est à nouveau présent et le restera d’une manière ou d’une autre jusqu’à aujourd’hui.

Entendons-nous bien, ce maillot est certes moins subtil que son successeur, mais il est beaucoup plus prisé des supporters pour plusieurs raisons : d’abord, le Japon s’est qualifié pour sa première coupe du monde dedans. Ensuite, Miura, star nationale et presque internationale, était à son apogée durant cette période. Enfin, les flammes sont imprimées dans le tissu, tandis qu’elles sont thermocollées sur le maillot de 1998, et du coup y sont bien plus fragiles. Si vous essayez d’en acquérir un, prévoyez dans les trois cent euros, facile ! Bref, les Japonais sont devenus fous de leur équipe pendant cette période, évidemment très positive pour le football nippon.

Le maillot de 1998 aura permis, lui, d’exposer l’équipe de manière tout aussi positive aux yeux du monde, et de recueillir à sa façon de nouveaux fans étrangers (pas mal de Français, au passage !). Le contrat un peu spécial est arrivé à son terme en 1999 et Adidas a pris seul le relais.

Sobriété et différence.

L’ère de la surbrillance étant révolue, Adidas en a profité pour justifier la création d’un maillot au design plus formel, complètement mât, et surtout arborant les trois bandes si chères,  dans tous les sens du terme, à la marque. Cela dit, le modèle proposé n’est utilisé par aucune autre équipe et a été conçu par la branche japonaise d’Adidas, qui possède une certaine indépendance, pour l’usage unique de la sélection nippone.

Si l’on ajoute à ça un matériau différent des productions internationales (probablement de meilleure qualité), la présence une nouvelle fois du drapeau nippon (à deux endroits !), et l’émergence d’une nouvelle génération de joueurs très prometteurs, ce maillot reste dans la continuité de ce qu’on a pu voir dans le passé : il est spécial.

En 2001, le Japon suit à sa façon les tendances des collections de la branche mère d’Adidas, en reprenant les finitions et un col similaires à d’autres équipes sous contrat avec la firme allemande. La teinte particulière du bleu, la présence, cette fois encore, du drapeau à deux endroits et une utilisation différente des manches par rapport aux autres équipes fait qu’il reste à part, sans pour autant rester énormément dans les mémoires, le Japon étant qualifié d’office pour la coupe du monde qui se profile chez lui et chez son voisin sud-coréen.

Pas n’importe quelle moustiquaire.

Et pendant ce temps-là…

Sur leur sol, Nakata et ses compères s’affichent dans une tenue plus épurée en apparence, et basant le gros de sa particularité sur son système de double couche. Néanmoins, la répartition des zones ventilées et la présence de liserés rouges le long des manches permettent d’y voir une métaphore du mont Fuji, d’après Adidas, et de toute façon de comprendre qu’il n’est pas fabriqué comme ceux des autres équipes, qui à part la France portent toutes le même modèle. Le drapeau bordé de doré finit de le faire sortir du lot. A cette occasion, Adidas vend le maillot du Japon à l’étranger dans une version « internationale », utilisant des matériaux et des éléments de design plus proches des maillots des autres pays que de la version japonaise de celui du Japon. Cela vient du fait que ces replicas « internationaux » sont fabriqués par la maison mère d’Adidas et non pas par la branche nippone.

Assez similaire…

La période suivante est un peu plus décevante du côté des uniformes : si ils restent fabriqués par la branche japonaise d’Adidas et gardent quelques spécificités assez subtiles (finesse du col, continuité des rayures, drapeau sur la manche, etc.), l’apparence globale des deux maillots est identique aux modèles utilisés partout ailleurs dans le monde. Le but est surtout de séduire à nouveau les supporters japonais en changeant un peu les couleurs habituelles : le bleu « Japon » devient un bleu plus clair, et le blanc traditionnel du maillot extérieur devient une couleur crème qui ne reviendra plus par la suite. Le replica domicile est à nouveau décliné en version internationale, à nouveau plus proche des maillots des autres équipes (les bandes finissent en dégradé en haut du maillot, par exemple), et à nouveau d’une qualité moindre.

Surfer sur la vague.

Et pendant ce temps-là…

Pour la coupe du monde 2006 en Allemagne, le Japon persiste et signe : il utilise les différents modèles conçu par Adidas pour la plupart de ses équipes, mais ceux-ci sont légèrement altérés par la branche locale, et des éléments de design viennent les personnaliser encore plus. A domicile, le bleu « Japon » fait son retour, les pointes ornant le col sont plus courtes et plus… pointues. Les flancs sont recouverts de liserés chromés formant des vagues, rappelant que le pays est un archipel. Le drapeau national est cette fois présent à l’arrière du col.

A l’extérieur, le maillot redevient blanc, et met en avant, sur le torse, onze lames qui font évidemment le lien avec les onze joueurs sur la pelouse. Ce maillot sera très apprécié des fans, mais seulement utilisé une fois par l’équipe A, contre les États-Unis, et ce en dehors de la coupe du monde. Petite déception pour eux. Toujours est-il que les deux maillots, en version locale, utilisent à nouveau des matériaux de bien meilleure qualité qu’ailleurs dans le monde. Le replica « international » se rapproche bien plus des maillots des autres pays, par ses matériaux et par ses éléments de design (les pointes, particulièrement).

Comme en 2004, très peu de différences.

Entre les deux coupes du monde 2006 et 2010, le Japon joue à nouveau dans un bleu plus clair. Les uniformes reprennent globalement le design commun à toutes les équipes sous contrat avec Adidas. Seuls le drapeau présent à l’arrière du col et un éventail de fines lignes jaunes sur le devant, rappelant le soleil levant, les rendent un peu spéciaux. Même le replica « international » ne présente pas énormément de différences avec son exemplaire japonais. Peu importe, les fans ont déjà la tête à la coupe du monde en Afrique du Sud.

Mais il s’avère tout de même que depuis 2001, les uniformes qui ne servent pas pour une coupe du monde participent moins, par leur apparence, à rendre le Japon remarquable sur les terrains, en limitant les éléments qui pourraient les faire sortir du lot.

Aussi forts qu’une… plume ?

La manche moulante « anti-tirage ».

La campagne commerciale autour de l’édition 2010 du maillot a failli faire vomir la rédaction de Nylon Ganbare : Adidas demandait aux fans de déposer dans des réceptacles, présents dans plusieurs magasins, leurs anciens maillots afin qu’ils soient recyclés pour produire les nouveaux. Pour vendre ce concept, Adidas mettait en avant le principe d’ADN de l’équipe nationale, que symbolisera le motif de plumes recouvrant tout l’avant du nouveau maillot. Ils n’avaient pas besoin de ça, ce motif (bien plus beau sur la version japonaise que sur le replica international) a tout de suite plu à une majorité de fans. L’intrigant carré rouge sous le col a d’abord rendu sceptique plus d’une personne, mais son côté pur et sa fonction (distinguer les différentes sélections par sa couleur : hommes, femmes, futsal…), ont permis de le faire très vite adopter.

Ajoutons à cela la technologie Techfit apparue à cette occasion chez toutes les « grosses » équipes, les manches « anti-tirage de maillot » que seul le Japon utilise (en sélection et pour ses clubs locaux) et le drapeau japonais présent juste au-dessus du cÅ“ur, et l’on peut dire que l’ADN a parfaitement été respectée : celle consistant à produire le plus beau maillot de la coupe du monde.

Du jaune fluo pour l’équipe de futsal.

Depuis, le Japon joue intégralement en bleu nuit, ce qui casse une éventuelle théorie comme quoi il allait utiliser du bleu clair entre chaque compétition mondiale. Il n’a cependant rien perdu de ses caractéristiques passées : un matériaux toujours de meilleure qualité qu’ailleurs, un motif particulièrement fort (une fine bande rouge vive verticale), le drapeau toujours au-dessus du cÅ“ur, la déclinaison des uniformes pour chaque section sportive de la fédération, avec un motif unique pour chacune d’elles… tant de choses que les autres équipes n’ont pas !

La JFA n’étant visiblement pas prête de changer d’équipementier, la légende des Samurai Blue continuera aussi dans ses uniformes pendant encore un moment. Cela les aidera certainement à attirer l’attention d’éventuels nouveaux fans, mais surtout, cela sera avant tout pour le plus grand plaisir de nos yeux.

Le mot du jour : STOCK

Un stock, c’est ce que les commerciaux japonais n’ont pas. Pour nous autres européens, ça peut paraître étrange, mais il est courant au Japon que les vendeurs par correspondance proposent des articles qu’ils ne possèdent pas. Si vous commandez un maillot dans une boutique online japonaise, il y a de grandes chances pour que votre interlocuteur soit obligé commander l’article à l’usine d’origine avant de vous l’envoyer.

A part ça, il existe plusieurs stocks : le stock commercial, destiné à la vente et composé en majorité de replicas, et le stock pro destiné à l’usage d’une équipe professionnelle pour la saison. Il est possible pour l’équipementier de renouveler les deux stocks selon la demande des clients dans le premier cas, des joueurs dans le second.

Parfois, le succès d’une équipe est inattendu et le stock commercial n’a pas été prévu initialement pour prévoir une demande qui du coup augmente énormément. Ce fut le cas de Puma en 2004, qui n’avait pas prévu le succès de Monaco en Champions League et qui a été obligé de proposer en urgence des maillots d’entraînement ou des modèles jamais portés par les joueurs en remplacement des maillots répliquant ceux des joueurs, alors en totale rupture de stock. Au Japon, les stocks sont aussi dosés avec prudence dans la plupart des équipes. Certaines, comme la sélection du Japon ou Urawa, voient leur équipementier leur fournir un gros stock d’entrée du fait de leur popularité, ce qui fait que l’on retrouve sur internet beaucoup de ces maillots neufs une fois la saison finie.

Emploi du terme dans la vie de tous les jours : « Comme dans la finance, les stocks au Japon, c’est vraiment une option…« 

A bientôt les enfants !

Nylon Ganbare

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