[Nylon Ganbare] Numéro 22

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Nylon Ganbare

Aujourd’hui, Nylon Ganbare, la rubrique haute en couleurs, aborde un sujet déjà évoqué par le passé si vous avez suivi assidument chaque publication : les flocages. Parce que les flocages participent au changement des tendances qu’expriment les uniformes dans leur ensemble, et en même temps en subissent parfois certains aspects pratiques. Ils savent tout faire, c’est génial.

Un représentant du football

Il est facile de constater qu’un flocage seul peut transporter celui qui l’observe à travers les âges, car comme les maillots, il a sa propre mode. Ainsi, le bon vieux flocage « 3D », majoritairement utilisé dans le football depuis les années 80 et jusqu’à la fin des années 90, a été le témoin de nombre de joueurs formidables et de victoires extraordinaires, et est aujourd’hui, dans l’imaginaire collectif, le flocage « retro » par excellence. Un terme flatteur en ce qui le concerne. On l’associe aussi souvent aux sports U.S., car il est énormément utilisé là-bas, encore aujourd’hui.

Ce flocage « 3D », à la forme quasiment universelle, a été décliné dans des variantes de coloris de contours, de coloris de remplissages, et de matériaux. Il a vécu le passage de la feutrine au « flex » dans la fin du siècle dernier. Et ces différentes déclinaisons correspondent, chacune, à des souvenirs différents et facilement localisables dans le temps à la simple vue de ses caractéristiques.

Le flocage « 3D » uni se rapporte le plus souvent aux sélections nationales des années 70 ou 80, le maillot serré et le short court, car il est utilisé sur toutes les rééditions de ces maillots d’époque, alors que dans les faits, il n’était pas encore démocratisé à l’époque et finalement encore peu utilisé ! L’Italie et l’Allemagne du début des années 90, elles, s’en sont servi et on le voit encore sur le dos d’un Klinsmann ou d’un Schillaci.

Le flocage « 3D » blanc avec un contour rouge, en ce qui nous concerne, évoque largement l’équipe de France de 1998. Le flocage « 3D » blanc dont les « trous » sont remplis de noir nous renvoient bien évidemment aux Urawa Red Diamonds des années 90. N’est-ce pas ? Non parce que je ne comptais pas passer la semaine à parler du flocage « 3D » non plus donc il me fallait une transition. Vous avez compris l’idée. Le flocage « 3D », c’est le football d’avant.

Durant ces mêmes années 90, les progrès réalisés dans la conception textile ont permis de réaliser des flocages bicolores et dans des formes uniquement limitées par l’imagination du designer, et c’est dans cette période que le Japon s’est professionnalisé en football. Alors que la J.League démarrait, la sélection nippone jouait avec un flocage blanc, bleu et jaune. Plus précisément, bleu entouré de jaune sur le devant, et blanc entouré de jaune sur le dos. Pas jaune devant et marron derrière hein, ne pas confondre. Cette liberté plutôt récente à l’époque est donc déjà bien exploitée.

Un élément identitaire à part entière

Ce sera pareil pour les clubs de J.League, chacun aura son flocage particulier, élaboré consciencieusement pour qu’il s’intègre aux couleurs des uniformes et participe à dégager une identité générale. Rien que chez les dix clubs originels, on trouvera une grande variété de flocages : Urawa utilisera le fameux flocage 3D, Yokohama, Nagoya et le Gamba Osaka ont choisi des flocages droits et simples, très lisibles et dans certains cas entourés d’une seconde couleur pour contraster avec le fond du maillot. Kashima et le Verdy avaient adopté des nombres en italique, dans une apparence très brute pour le premier, très littéraire pour le second. JEF United Chiba choisit un flocage assez épais et lui aussi bicolore, très stylisé, et surtout inchangé à ce jour. Shimizu avait opté pour des nombres bleus et blancs, angulaires et droits, qui ne furent abandonnés que douze ans plus tard. Enfin, les Flügels – paix à leur âme – et Hiroshima adoptèrent une police de numéros orthogonale et unie : il s’agissait d’un flocage « 3D »… sans la 3D.

Tous ces flocages étaient déjà fabriqués en matières plastiques et non pas en feutrine. Pourtant, la feutrine est aussi capable d’afficher plusieurs couleurs sur un flocage, elle tient généralement mieux et plus longtemps au maillot, mais elle est trop lourde et paradoxalement, n’a pas fait le poids de ce côté-là face au « flex ».

Cette saison initiale a aussi établi les règles de positionnement des flocages en J.League : dans le dos bien sûr, mais aussi sur l’avant du maillot, ce qui n’est pas fréquent en football, mais n’oublions pas que les Japonais sont allés s’inspirer aux États-Unis pour préparer leur ligue professionnelle. Les numéros sont aussi présents sur le short, du côté gauche (lorsque l’on fait face au joueur). Et cela restera du côté gauche. Si c’est assez strict en ce qui concerne le short, sur le maillot, la position du numéro frontal variera selon les modes (sous le sponsor centré, sous le sponsor à droite, à la gauche du torse, etc.). Les noms des joueurs apparaissent petit à petit dans les années 2000, et sont généralement placés dans le bas du dos, le haut étant réservé à un sponsor. En Asian Champions League, l’absence de sponsor dorsal permet de positionner le nom en haut.

A ce sujet, j’ai une anecdote délicieuse : un Anglais est un jour venu me dire qu’il trouvait ça étrange, voire anormal, que les numéros soient à gauche sur le short au Japon alors qu’ils sont réglementairement à droite en Premier League. Ce à quoi j’ai répondu que oui peut-être mais que c’était uniquement à cause de l’absence de Honda. Il n’a rien trouvé à redire. La moralité c’est qu’Honda rien sans rien euh… non attendez… j’ai du me gourer quelque part… En tout cas en anglais c’était finement amené et lourd de sens.

Un peu plus tard, le Japon choisit une police de numéros très orientale pour sa sélection, et parfaitement adaptée aux flammes qui flamboyaient sur les manches des maillots. Une fois encore, le flocage a amplement aidé à rendre l’uniforme mythique et aujourd’hui, tout fan du Japon qui se respecte est capable de le reconnaître entre mille. Bon en même temps, vous ne le verrez nulle part ailleurs…

Fashion victim

A partir des années 2000, certaines règles s’instaurent chez les équipementiers, qui, désormais, associent systématiquement un flocage à leurs collections. Ce flocage est donc souvent porté par les équipes qui utilisent les uniformes issus de ces collections. Enfin, c’est surtout le cas pour les sélections nationales, dont le Japon. Pour les clubs, le flocage est soit déterminé par la ligue (Ligue 1, Scottish Premier League, Premier League, Major League Soccer, etc.), soit personnalisé par le club. En J.League, c’est pendant très longtemps le second cas qui a été en vigueur. Mais certains clubs ont, petit à petit, fini par adopter les flocages que leur fournisseur voulait bien leur donner. Au Japon, cela dit, mêmes les flocages « génériques » des marques sont, au minimum, personnalisés rien que par la présence du nom ou du logo du club sur le numéro. Un vrai luxe.

Une chose est sûre, la J.League n’a jamais imposé un flocage commun à tous les clubs. Ils changent régulièrement. En moyenne, tous les deux ans je dirais. Cela est devenu une méthode pour que le flocage accompagne les apparences globales des tenues, en même temps que les errances et les fantaisies des designers…

Lorsque le mesh est apparu à la fin des années 90, on a commencé à produire des flocages perforés, soi-disant respirants. Aujourd’hui encore, cela arrive, et cela donne indéniablement une touche supplémentaire de modernité, tout simplement parce qu’on attribue cette caractéristiques à une méthode de conception plus élaborée et plus fine, qui était impossible jadis.

Plusieurs clubs japonais ont utilisé des flocages perforés, les principaux étant les Yokohama F.Marinos, le Gamba Osaka et les Urawa Red Diamonds. Mais les perforations ont pris tout leur sens lors de la coupe du monde 2002 lorsque les maillots eux-mêmes étaient perforés, comme c’était le cas du Japon. D’ailleurs, cela prenait encore plus son sens dans le cas du Japon puisque le maillot était perforé aux endroits où les numéros étaient placés ! Dans le cas de beaucoup d’autres équipes, les numéros perforés étaient collés sur une surface pleine, ce qui fonctionnait forcément beaucoup moins bien et tenait plus de l’ornemental.

Aujourd’hui, c’est surtout devenu ornemental : en cette saison 2013, un paquet d’équipes utilise des flocages perforés, pas forcément par des trous, mais le plus souvent par des lignes ou des rectangles, d’épaisseurs variables, qui forment un motif à part entière (Nike, Adidas…). Cela apporte encore plus de variété. Ou bien, cela pourrait si tous les clubs équipé par Nike n’avaient pas un flocage strictement identique (le blason faisant exception). Idem pour Adidas. Mais ça s’est déjà vu, et ça se verra encore, il ne faut pas s’inquiéter.

L’autre évolution majeure qui a déteint (un peu trop) sur les flocages, est la possibilité d’inclure un aspect métallique au matériau « flex ». Cela est apparu à peu près en même temps que les maillots dorés ou argentés, au début des années 2000. Et inutile de préciser que les équipementiers et les équipes elles-mêmes en abusent, au point où le flocage devient parfois difficile à lire ou ne s’accorde pas du tout avec le reste de la tenue. C’est-à-dire que bon, le doré, ça ne va pas avec tout…

On pourrait parler du Barça mais comme la rédaction de Nylon Ganbare a des goûts simples, elle va prendre le Thespa Kusatsu (prononcez Cetzpa) comme exemple. Pendant la période où le club était équipé par A-Line, il utilisait un flocage doré à bordure rouge. Le maillot était bleu nuit et jaune pâle. J’ai tendance à définir le doré comme une teinte de jaune foncé brillante. On a donc du jaune foncé brillant placé sur des bouts de jaune pâle mât, et cela donne l’impression que le staff n’a pas su choisir entre les deux teintes de jaune et a tout mis, pour être sûr d’avoir son jaune traditionnel mais aussi du doré trop classe et à la pointe de la mode (du début du siècle). Ça ne marche pas très bien. Et on peut trouver d’autres exemples montrant que les équipes veulent mettre du doré pour mettre du doré. On en trouve aussi concernant de l’argenté, mais en général celui-ci s’intègre mieux car sa teinte est neutre, seul l’aspect brillant peut vraiment gêner.

On préfèrera toujours les flocages en adéquation avec les couleurs historiques de l’équipe, ou au moins en adéquation avec les couleurs utilisées sur le maillot ! Le flocage est avant tout une façon d’exprimer une information réglementaire, mais aussi un complément de plus en plus élaboré à l’esthétique générale des joueurs, qui représentent le club ou le pays, qui sont leur image. Il ne faut pas le négliger, et au contraire s’en servir pour mettre en avant le professionnalisme et l’unicité de l’équipe, ou au moins ne pas tomber dans des phénomènes de mode qui ne s’appliquent qu’au flocage, sans considérer le support sur lequel il est appliqué dans l’opération. Le Japon s’en sort pas mal par rapport à d’autres.

Le mot du jour : PLASTOQUE

Au début de la dernière décennie, quelqu’un a eu la bonne idée d’utiliser ce matériau pour fabriquer les badges des compétitions, que l’on positionne sur les manches des maillots. Le plastoque a tenté de succéder à la feutrine. Et bien ça n’a pas marché des masses, car le plastique se replie sur lui-même après plusieurs lavages.

Aujourd’hui, il est combiné à la feutrine sur certains badges comme celui de la Serie A italienne, ce qui permet de palier à ce problème. Il est aussi utilisé pour fabriquer les blasons des clubs et les logos des marques apposés sur les maillots. Ceux-ci ont aussi tendance à se replier légèrement au fur et à mesure qu’on les passe à la machine. Mais cela permet de représenter plus précisément les dessins des blasons par rapport à la broderie classique.

Emploi du terme dans la vie de tous les jours : « Le plastoque, c’est choc.« 

A bientôt les enfants !

Nylon Ganbare

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