Contribution des lecteurs #3 : humiliation, déshonneur, infamie (Bunny-Tsukino)

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Humiliation, déshonneur, infamie. Dans ce duel asiatique pour la médaille de bronze des J.O 2012, le Japon s’est incliné logiquement face au bourreau et ennemi de toujours, replongeant ainsi les fans dans leur pire cauchemar, celui de l’époque pré-2010, quand les rouges molestaient les nippons sans vergogne à chaque duel ou presque. Un temps qu’on disait révolu … 

Dès l’entame de match, les coréens donnèrent le ton : ostensiblement, ils affichèrent l’envie de muscler le jeu, de presser haut avec énergie, d’imposer un impact physique important et un jeu essentiellement aérien. En somme, tout le modus operandi habituel que nos japonais abhorrent. Pourtant, ceux-ci ont montré un visage plus que séduisant jusqu’à la 40ème minute. Mieux, une indéniable aisance technique, un collectif huilé et une discipline tactique évidente leur ont permis d’installer peu à peu une domination territoriale incontestable. Mais aussi, de déployer un jeu au sol fait de passes courtes et de décalages, ou encore, de pouvoir travailler la défense coréenne avec patience et adresse, obligeant les adversaires à multiplier les efforts pour récupérer la balle, ou au moins colmater les brèches créées par les déplacements japonais. Cette maîtrise invitait immanquablement à l’admiration béate. Dire qu’on pensait à ce moment-là à un but nippon relevait du doux euphémisme …

Mais en songeant trop tôt à la victoire, nous avons tous omis un facteur essentiel dans chaque derby digne de ce nom : le mental. La capacité à dominer psychologiquement le rival. A l’amener à douter. A lui signifier qu’on va le dévorer, le manger tout cru. Que jamais il ne lui sera offert quoi que ce soit dans la rencontre. Afin d’y parvenir, souvent, il faut recourir à l’intimidation physique, à des mots éloquents, à des regards assassins ou encore à des gestes brutaux. Certes, il s’agit ici de ramener le football à un combat et c’est moche, mais dans un match si particulier entre deux équipes finalement assez proches l’une de l’autre, la différence peut se faire sur la motivation, l’opiniâtreté, la hargne. J’ai souvenir par exemple de confrontations épiques entre l’OM et le PSG dans les années 90, eh bien figurez-vous que les marseillais, avec le très dissuasif Eric Di Meco, s’adjugeaient le succès avant même d’avoir foulé la pelouse, juste en impressionnant les parisiens dans les couloirs menant au terrain ! Il suffisait ensuite de les bousculer dès les premières minutes de la rencontre, et le tour était joué. Ce furent des triomphes acquis à la grâce de l’abnégation. Autre exemple : combien de fois les tocards de City, alors qu’ils étaient un club quelconque de Premier League, ont-ils vaincu l’ogre United à la seule force de leur envie ? Je ne les compte même plus, il y en a tout simplement trop. Le football n’étant pas une science exacte, ses derbys peuvent se gagner à la volonté, à la hargne, à la motivation.

Malheureusement, au jeu de l’intimidation et de la provocation, ce furent les coréens qui dégainèrent les premiers. Et qui restèrent désespérément les seuls à le faire. D’abord, Koo J-C. Transcendé par l’enjeu, dans un état second, limite shooté, le joueur de Augsburg se fendit de contestations pour le moins violentes, après qu’il eut écopé d’un carton jaune à l’issue d’une faute grossière et dangereuse. Puis, Ki Sung-Yueng, le préposé à la violence durant les derbys, le tocard. Il a effectué un magnifique tacle à retardement avec les deux pieds décollés. Classique. Mais pourquoi ces deux enragés n’ont-ils pas été sanctionnés d’une exclusion ? Nous ne sommes pas en Asie, tout de même ! Ah mince, si, en fait. L’arbitre est ouzbek …

Ces deux actes inqualifiables ont eu le malheur de couper nos ouailles dans l’élan qui les poussait vers le but. Les coréens ont atteint leur objectif, le match est devenu haché, brouillon. Les nippons déjouent mais se refusent à donner la réplique. Dès lors, on sent que le match bascule. Que dans cette opposition, une équipe, la Corée jouit d’une rage supérieure à celle du rival. Et comme par hasard, cette même équipe ouvre le score après un joli travail solitaire de Park, lequel n’est même pas ennuyé par les trois défenseurs japonais qui l’accompagnent. Et qui ont même tendance à reculer à mesure qu’il avance !!! 0-1. La rencontre est pliée. Victoire psychologique des coréens. Au revoir tout le monde. A la prochaine.

Le second but se veut anecdotique, tant les japonais auront pêché dans le sentiment de révolte et d’envie. Jamais, on ne les a sentis en mesure d’emballer le match, de se rebeller, d’essayer de jouer avec nerfs du rival comme ce dernier l’a si bien fait. Au contraire, on a eu droit à un visage fade, exsangue, amorphe, terne, comme si à trois quarts d’heure du coup de sifflet final, un insurmontable découragement les avait saisi. Difficile à comprendre. Le manque de fraîcheur physique ? L’écart abyssal qui les sépare des coréens niveau puissance athlétique ? Certes, ce sont deux handicaps dont il faut tenir compte, mais tout de même, un peu d’insurrection n’aurait tué personne ! Si les coréens nous soumettent un combat, qu’on leur répondre, que Diable ! Qu’on leur montre que ce jeu-là ne nous impressionne plus ; que les japonais, certes respectueux de natures, ne se laissent pas marcher dessus la tête basse ! Là, nous avons prouvé tout l’inverse, et c’est d’autant plus rageant que les Taeguk Warriors, avant le match, avaient prévenu les japonais en pointant du doigt leur fameuse « faiblesse mentale ». L’occasion de les faire taire nous était donnée, mais elle nous a glissée entre les mains. Dommage …

Du coup, le seul désir qui m’anime en cette soirée cauchemardesque, c’est de retrouver la Corée du Sud, cette fois-ci avec nos stars de l’équipe A, puis de remettre les pendules à l’heure. A partir de l’Asian Cup 2011, nous avons commencé lentement à quitter cette spirale de la lose dans laquelle nous avaient happés les coréens, et il s’agit maintenant de ne plus y retomber. Équipe A contre Équipe A, le duel sera beaucoup plus équitable. N’est-ce pas, les Park, Ji, Koo, Kim, Ki, Nam ou encore Jung ?

Julia (Bunny-Tsukino) du forum Nippon Ganbare

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