Rencontre avec les membres : Keiran, ou le passionné de tactique (3/4)

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Le mondial approche à grands pas. Quel genre de parcours imagines-tu pour le Japon ? 

Si on parle d’ambition « réaliste », je pense qu’un quart de finale est possible avec un exploit en huitièmes de finale contre l’Uruguay ou l’Italie. Après, ce sera plus difficile en terme d’intensité physique, de concentration. Mais sortir du groupe et accéder aux huitièmes de finale pour la troisième fois en seize ans, ce serait déjà une réussite.

Il faudra d’abord écarter les adversaires du groupe. Est-ce qu’ils te font peur ? 

Oui et non. C’est sans doute le groupe le plus homogène de la compétition avec des équipes possédant des philosophies de jeu complètement différentes. La Japon a largement les moyens de passer. Des trois concurrents, la Côte d’Ivoire me fait le moins peur en terme de niveau, elle est vieillissante, peu équilibrée et son collectif vraiment moyen. Mais on sait aussi qu’athlétiquement, ça risque d’être difficile pour le Japon. Ce sera dur aussi face à la Colombie mais elle est friable en défense. Tandis que la Grèce est très cohérente dans chaque ligne.

Y a-t-il, dans ces équipes, des joueurs que tu crains particulièrement ?

Pour la Côte d’Ivoire, je dirais Gervinho et Yaya Touré, qui sont les hommes en forme et ceux qui portent l’équipe.
Quant à la Grèce, Mitroglou est un attaquant très complet et adroit mais son départ à Fulham n’est pas la meilleure des idées. Samaras est un joueur que je crains beaucoup, il est expérimenté et marque dans les matchs importants. En défense, Papastathopoulos est très bon.
Enfin, pour la Colombie, malgré l’absence de Falcao, il y a beaucoup de bons joueurs avec Jackson Martinez, Adrian Ramos ou encore les deux latéraux, Armero et Zuniga qui sont très offensifs.

Des individualités globalement supérieures aux nôtres…

Sans doute, mais elles ne sont pas toujours complémentaires ou souffrent d’une cohésion inexistante. C’est le cas respectivement pour la Colombie et la Côte d’Ivoire. Concernant la Grèce, ils ont un joueur clé devant et derrière, mais le reste de l’équipe, s’il tient la route, est surtout valorisé par son collectif.

Dans ce cas, quelle(s) stratégie(s) prônes-tu contre ces adversaires ? 

Il y aurait beaucoup à dire. Déjà, quel que soit l’adversaire, il faudra être à fond sur la totalité du match. Il sera très difficile de gérer.
Face à la Côte d’Ivoire, l’erreur serait de craindre leurs joueurs de profondeur et de jouer bas. S’ils arrivent lancés en face à face, nos défenseurs seront en difficulté et auront du mal physiquement dans leur surface. Donc je pense que jouer haut, presser les 4 défenseurs adverses et couper les transmissions vers Yaya Touré serait la meilleure solution. Techniquement c’est limité, ils ne résisteront pas à un pressing bien organisé. Après, il faudra jouer vite et en passes, pour éviter au maximum les duels. Leur défense ne tiendra pas le choc face à des appels croisés et dans leur dos.

Pour la Colombie, ce sera plus difficile, il faudra mettre l’accent sur la charnière centrale adverse qui n’aime pas avoir le ballon dans les pieds. Au milieu, ce sera un vrai combat et nos joueurs de côtés devront être très actifs et concentrés sur toutes les phases de jeu. Le joueur de pointe doit profiter de l’espace ouvert par les latéraux pour prendre la profondeur derrière Yepes. Zapata est très rapide mais pas très concentré, il serait une cible idéale pour le duo Kagawa-Honda. Il faudra donc tenir au milieu, répondre à leur âpreté et faire attention à James Rodriguez qui prend les intervalles et a une bonne frappe de balle. Ce sera le match le plus compliqué tactiquement, il sera nécessaire d’alterner le pressing et une défense plus basse pour contrôler les offensifs adverses. Ces transitions seront la clé.

Face à la Grèce, le Japon a les moyens de faire le jeu mais devra varier ses modes d’attaque car la défense grecque est composée de très bons joueurs qui savent jouer haut. Ce n’est plus la même équipe qu’en 2004. Il faudra prendre l’ascendant au milieu et contrôler Mitroglou, ainsi que le jeu de soutien de Samaras. Le piège serait de se laisser entraîner dans un faux-rythme qui pourrait endormir les Japonais et profiter aux grecs. Le Japon s’est souvent fait avoir par cette façon de jouer, il faudra donc maintenir l’intensité sur tout le match.

Si on franchit tous ces obstacles, quel adversaire voudrais-tu éviter en huitièmes ? Inversement, qui souhaiterais-tu rencontrer ? 

Malgré la bonne prestation du Japon face à l’Italie en Coupe de des Confédérations, je préférerais les éviter car ils connaissent ce genre de compétition mieux que personne. Et ils seront beaucoup plus mobilisés que l’été dernier.
L’Uruguay serait intéressant. Difficile certes, car il y a un Suarez stratosphérique et un Cavani impressionnant d’abnégation, mais le reste de l’équipe n’est plus ce qu’il était en 2010. C’est une formation qui n’aime pas faire le jeu. Les attendre sans subir, ce serait la clé pour les maîtriser puis contrer par les côtés.
Enfin, il y a l’Angleterre, qui n’est pas un équipe de très haut niveau. Il y a de bons joueurs mais ça reste poussif dans la construction. Je pense que face aux anglais, le Japon pourrait réitérer ce qu’il a fait face à la Belgique, à savoir imposer sa force collective face à des joueurs intrinsèquement supérieurs. Donc je dirais l’Angleterre, mais il faudrait qu’elle passe les poules, déjà…

Pour finir, tu vas jouer au sélectionneur : quelle serait ta liste des 23 pour la Coupe du monde ? 

Pour une Coupe du Monde, il faut avoir seize joueurs « titularisables »  pour envisager la compétition sereinement : le onze type plus un latéral, un défenseur central, un milieu central, un ailier et un avant-centre. Il faut compter également un ou deux joueurs offensifs capables de faire la différence quand ils entrent en jeu, des « supersubs », des joueurs en pleine confiance. Je pense aussi qu’avoir chaque poste doublé est plus pratique pour pouvoir se préparer à l’entrainement, dans les oppositions.

Les gardiens ne changeront pas, ils ont donné satisfaction : Kawashima, Nishikawa, Gonda.

Au niveau de la défense, j’espère que Uchida sera disponible. Sinon, du classique, avec peut-être Makino qui pourrait permettre de passer à trois en défense, en plus d’apporter au groupe dans l’ambiance de tous les jours. Je dirais donc : H. Sakai, Uchida (ou Tokunaga ou Komano ou Inoha), Morishige, Yoshida, Konno, Inoha (ou Makino), Nagatomo, G. Sakai.

Au niveau des milieux centraux, tout s’est éclairci depuis quelques mois : Hasebe, Hosogai, Yamaguchi, Endo.

C’est au niveau des offensifs qu’il y a des postes à prendre. Si Honda, Kagawa et Okazaki sont inamovibles, on ne sait pas dans quelle position jouera ce dernier. Cela pourrait dépendre des matchs. En pointe, Osako a un vrai coup à jouer et Kakitani semble avoir fait son trou. Kiyotake montre à Nuremberg qu’il sait prendre les clés du jeu. Reste deux postes, sur les côtés voire en pointe. C’est là qu’il faut des joueurs en confiance, capables d’être de bons jokers. Tout dépendra donc du début de saison en J-league et/ou de la fin de saison des européens.

Milieux offensifs : Honda, Kagawa, Okazaki, Kiyotake, Saito, Kakitani ou Haraguchi.
Attaquants : Osako, Kawamata ou Kakitani.

Rendez-vous dimanche prochain pour la dernière partie de cette interview !

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