[Nylon Ganbare] Numéro 18

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Nylon Ganbare

Si comme moi, l’indécision vous fascine, alors vous trouverez certainement le Tokyo Verdy intéressant. Si vous voulez (et même si vous ne le voulez pas), c’est un peu comme le Shonan Bellmare : les uniformes se suivent et ne se ressemblent jamais. La différence vient du fait que dans le cas de Shonan, les équipementiers successifs composent principalement avec les deux couleurs historiques du club, tandis que dans le cas du Verdy, seule une couleur perdure année après année : le vert. Cela demande un surplus d’ingéniosité pour renouveler l’uniforme sans inclure une couleur secondaire totalement hors de propos. Nylon Ganbare, la rubrique vierge de tout sponsor, préfère vous prévenir que ce surplus ne se ressent pas toujours.

Ce n’est pourtant pas compliqué, il était assez clair que le vert, un vert un peu foncé au passage, et le blanc composaient, seuls, le schéma de couleurs du club. Beaucoup de clubs arrivent à vivre avec ce simple A.D.N. : le Panathinaikos, le Celtic Football Club, Palmeiras, Beijing Guoan (jusqu’en 2013 en tout cas), l’A.S. Saint-Etienne (sauf des fois), le Werder Brême (sauf tout le temps)…

Voilà du vert qui donne la pêche.

Alors oui, c’est un peu répétitif à force, surtout que le blanc a le pouvoir de rendre certains uniformes plus fades qu’ils ne sauraient l’être avec d’autres couleurs, et que le vert n’est pas une couleur qui donne beaucoup de peps pour commencer. A vrai dire, il ne se remarque vraiment que lorsqu’il est clair, comme on peut l’observer du côté de Wolfsburg, ou fluo, comme on peut l’observer du côté de Jeonbuk.

Voilà du vert qui donne la pastèque.

Les dirigeants du Tokyo Verdy, de leur côté, n’ont pas voulu s’embarrasser de telles questions, et ont décidé rapidement d’octroyer aux uniformes une couleur ornementale qui viendrait « soutenir », en quelque sorte,  le vert traditionnel. Cela a démarré en 1995. Avant cela, les joueurs jouaient dans des tenues

C’est vert, c’est vide, mais ça fait quand même mal aux yeux…

exclusivement vertes et blanches : le modèle « pastèque » en championnat, le modèle « boring as sh** » en coupe. C’est d’ailleurs sous ces apparences que l’équipe s’est forgé le plus gros de son palmarès, sa réputation nationale et par là-même sa popularité. Comme quoi la simplicité a du bon. Si l’on doit trouver un terme pour définir ce changement régulier de couleur secondaire qui est, depuis, toujours en vigueur, on peut éventuellement parler d' »humeurs ». En gros, ça dépend un peu de quel pied se lève le responsable marketing du club.

L’humeur noire

Couleur appropriée à la décrépitude qui a si bien accompagné l’équipe à partie de 1995, on pouvait se douter que ce choix n’entraînerait rien de bon, uniformes compris. En 1995 même, la responsabilité du design en incombait toujours à Mizuno, garantie supplémentaire, à l’époque, d’un résultat indigeste. Ça n’a pas loupé. On peut dire que le virage n’a pas été bien négocié puisqu’il a laissé deux grosses traces de pneu sur le maillot…

Exclusif : le designer de l’époque.

Un motif gargantuesque, impliquant des dégradés allant du noir au blanc et aussi subtiles qu’un marquage à la culotte de Tulio Tanaka. L’intégration de cette couleur nouvelle a été assez brutale : le noir prend autant de place que le vert sur le maillot, et éjecte complètement le blanc du short. Il devient ainsi la couleur secondaire.

Il le restera d’ailleurs les saisons suivantes après l’arrivée de Nike. Le noir est vu comme une couleur moderne à la fin des années 90, et cela encourage la marque au swoosh à le consacrer en lui donnant l’exclusivité du short. Si avec Mizuno, le schéma consistait en un maillot vert et un short vert, il consiste cette fois en un maillot vert et un short noir. Le design en lui-même fait très américain, et consiste à colorier le haut du maillot en noir et à le séparer du reste (vert) par une bande blanche plutôt épaisse. Notez que pendant cette période, Nike a l’idée étrange de ne pas afficher le swoosh sur certains maillots, comme celui de l’Italie.

En 1997, le noir devient presque la couleur principale ! Il est présent sur les manches, sur les flancs, sur le col, sur tout le short une fois encore… le design reste très « sport US » et cette fois, ce sont les flancs qui sont séparés par d’épaisses lignes blanches. Ce n’est pas très fin, dans la continuité de 1996, mais au moins on ne dirait pas qu’on a roulé dessus avec un 4×4. Le maillot extérieur est blanc, pour la simple raison qu’il aurait fait redondance avec le maillot domicile si il avait été noir. On peut penser que c’est la seule raison qui a empêché que cela n’arrive.

Cette humeur a été conclue en 2000, quand Nike s’est dit que le noir était grillé au Japon et qu’il faudrait alors penser à aller contaminer la France. Alors bon, le short n’est pas redevenu blanc, il ne faut pas déconner, mais il est redevenu vert, et le blanc a repris son rôle de couleur secondaire sur les côtés du short et du maillot. Le noir ? Il fait office de liseré séparant le blanc et le vert. « Liseré », et pas « bande épaisse », ce qui pour le coup rend l’ensemble un poil plus subtil qu’avant. Cette couleur passagère qu’est le noir a donc fait une sortie honorable (avec un tout petit retour express en 2011 sous forme de liserés, encore une fois).

L’humeur jaune

Souvent, le jaune est associé au vert presque par défaut (je n’ai jamais vraiment compris ce réflexe, même si je préfère ça à du bleu ou du rouge). Le fait que le vautour soit jaune dans le blason du club rendait la chose inévitable à un moment ou à un autre. Ce moment est arrivé en 2005. A cette occasion, le Tokyo Verdy a profité de la gamme Total 90 de Nike, avec une petite touche personnelle qui différenciait le modèle du maillot de ceux des autres clubs : des petits panneaux courbes un peu épais et suivant le tracé de la couture séparant le torse des épaules. Ces petits panneaux ont justement servi à accueillir la couleur jaune. Un assez bon dosage qui permet de faire ressortir la couleur par sa vivacité (ah bah, on est au Japon hein !), sans en mettre des tartines. Ici, le jaune est véritablement un accent.

Cette couleur fera un come-back après plusieurs années d’absence, en 2010. Le jaune prendra la forme de fines rayures sur l’avant et sur le dos du maillot. Ça aurait tout aussi bien pu être du blanc pour le coup, l’épaisseur des lignes n’étant pas assez grande pour que la vivacité du jaune puisse réellement s’exprimer ici.

Il a récemment refait une apparition dans une teinte proche du vert fluo, en 2012. Cette fois, les parties du maillot lui étant consacrées furent assez larges pour en faire la couleur secondaire d’une saison. Le blanc fut totalement absent de l’uniforme principal (si le flocage ne compte pas, du moins). Ce n’a pas été un rôle très marquant, le maillot était suffisamment riche en design pour exister sans la présence de jaune. Mais c’était une caractéristique « moderne », dira t-on.

L’humeur grise

Le gris a succédé au noir comme la couleur tendance des mid-2000’s, et en bonne fashion victim, le Tokyo Verdy a emboîté le pas dès 2003. Concrètement, le gris a remplacé le blanc. Le short est devenu gris, et tout ce qui aurait du être blanc sur le maillot, dans d’autres circonstances en tout cas, est devenu gris. Ça donnait un petit côté futuriste aux uniformes, mais ça participait aussi à les rendre encore plus fades selon la luminosité. Les uniformes de cette période restent dans la mémoire des supporters grâce aux débuts de Morimoto avec le club. Il n’a d’ailleurs jamais joué à Tokyo autrement qu’avec du gris sur les fesses.

Ouaip, le gris faisait fureur.

Le gris est resté jusqu’en 2006 et a cohabité pendant deux saisons avec le jaune. La hiérarchie était bien établie : le gris remplaçait toujours le blanc en tant que couleur secondaire et sur le short, pendant que le jaune faisait figure d’ornement pur et dur comme on l’a vu précédemment.

Ils se marièrent tous et eurent beaucoup de sponsors moches.

Il revient en 2013, sous une forme quasiment argentée, et également intégré dans le dégradé frontal composé de petites étoiles, symboles de la marque Athleta qui équipe le club depuis 2012. Le rendu est bien différent de l’époque de Nike, mais chacun se fera son idée quant à savoir lequel est le plus réussi.

L’humeur orange

Couleur à priori venue de nulle part, car absente des armoiries du club sans être non plus une nuance de blanc, on peut pourtant trouver une explication à sa présence de 2007 à fin 2008 : début 2007, Kappa a succédé à Nike et a introduit cette couleur. Kappa, c’était aussi, à cette époque, l’équipementier du Werder Brême. C’est durant le partenariat entre le club allemand et la marque italienne que celle-ci a introduit du

« Orange power ! »

orange sur les maillots, jusque là principalement verts. C’est aussi pendant cette période que le Werder obtenait de bons résultats en championnat et participait plus ou moins régulièrement à la ligue des champions. Les gars de chez Kappa ont-ils voulu faire du Verdy le Werder Brême japonais, en calquant ses uniformes sur ceux des Allemands ? Le lien est presque flagrant.

Dans les faits, le orange sert juste de couleur aux coutures. Donc, ici encore, le rôle est vraiment ornemental. Pas de quoi supplanter le blanc, puisque celui-ci a complètement disparu dans l’opération (le Verdy joue alors intégralement en vert).

Une autre couleur gênante se cache dans cette image, sauras-tu la trouver ?

En 2008, le maillot change très peu. Le orange préposé aux coutures mais gagne de la place en bas du maillot, sur des panneaux triangulaires, ce qui amplifie le lien avec le Werder Brême lorsque le maillot est sorti du short. Par contre, c’est vraiment insignifiant lorsque celui-ci est rentré dans le short. C’est la dernière fois que l’on verra cette couleur sur un maillot du Tokyo Verdy.

De toutes les couleurs, c’est certainement celle qui avait le moins de légitimité à apparaître sur la tenue de ce club. Cela restera le cas jusqu’à ce que le tour d’autres couleurs aussi malvenues vienne. On peut craindre l’année où le rouge fera partie du design, par exemple… brrr… j’en frémis.

En attendant, sachez que le rose tient le rôle de toutes ces couleurs sur les maillots de l’équipe féminine du club, et ce depuis 2012. Les maillots sont d’ailleurs assez recherchés, car l’équipe rencontre beaucoup de succès, sportivement. Initiative pas si originale, puisqu’elle reprend l’idée de la JFA pour les sélections nationales japonaises. Mais ce système de signalétique basée sur la couleur reste assez amusant, et cela prouve que l’on réfléchit de plus en plus à l’image des équipes féminines, avec une approche plus indépendante qu’auparavant. Même si le choix du rose est assez stéréotypé, cela a certainement plus de valeur que du noir, du gris ou du orange !

Le mot du jour : LYCRA

Un genre de composant textile qui rend les tissus élastiques. On peut légitimement affirmer que sans lui, cela ferait douze ans que la marque Kappa aurait fait faillite.

Il semble que son intégration dans les matériaux soit plus coûteuse que pour d’autres, ce qui explique qu’il est généralement présent, avant tout, dans les maillots destinés aux joueurs. Lorsqu’il est présent dans la composition des replicas, c’est la plupart du temps dans un pourcentage bien inférieur au modèle pro.

C’est l’ennemi numéro deux du supporter britannique, le numéro un étant n’importe quel autre supporter britannique, car le lycra met outrageusement en avant sa silhouette gavée de houblon, lorsqu’il est présent dans le maillot qu’il porte. Son utilisation quasi systématique dans le rugby fait également beaucoup de malheureux dans les tribunes.

Emploi du terme dans la vie de tous les jours : « Mon lit craque facilement, il manque d’élasticité.« 

A bientôt les enfants !

Nylon Ganbare

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